zOld: Tahar légende urbaine???

Assignment: Tahar Ben Jelloun : la littérature et les légendes urbaines

Tahar Ben Jelloun : la littérature et les légendes urbaines

 

« Ceci est un fait divers. Certes, pas banal. C’est même incroyable, mais vrai. C’est arrivé au mois de novembre 1980 à Casablanca. L’histoire de Slimane m’a été racontée par plusieurs personnes. Alors, écoutez… »
(Ben Jelloun, Tahar. « Un fait divers et d’amour. » Visages de femmes: nouvelles. Montpellier: Entailles, 1987.)

 

Tahar Ben Jelloun, né au Maroc en 1944, vit actuellement à Paris. Il est probablement l’écrivain francophone le plus traduit dans le monde. On peut citer parmi ces romans L’Enfant de sable (Seuil, 1985) et La nuit sacrée (Seuil, 1987). Le dernier a remporté le prix Goncourt, un grand prix littéraire français. Le Racisme expliqué à ma fille (Seuil, 1997) s’inspire des questions difficiles que lui posait sa propre fille Mérième. Cet essai, qui n’était d’abord pas destiné à la publication, est maintenant traduit en 25 langues. Pour découvrir plus sur la vie et l’oeuvre de Tahar Ben Jelloun, rendez-vous sur le site officiel de l’écrivain.


Comment lire un texte ?

 

Ben Jelloun, Tahar. La prière de l’absent. Paris: Seuil, 1981: 123-124.

 

Chapitre 10 : La nuit claire de l’apparence
C’était une belle Chevrolet noire datant de la fin des années cinquante. Une voiture large et solide. Le tableau de bord était là pour le décor. Les aiguilles indiquaient depuis longtemps, depuis toujours, le vide, le néant. Elles signalaient ainsi l’insolence du temps. Elles s’étaient arrêtées dans leur cadran, un peu au hasard. Le propriétaire du taxi les astiquait avec un chiffon jaune. Il aimait faire briller le métal.

 

 

Le premier paragraphe de cet extrait comprend certains mots qui ne vous sont probablement pas familiers. Vous savez sans doute ce que c’est qu’une « Chevrolet » ou une « voiture. » Alors, à vous de jouer au détective linguistique !

 

En imaginant l’intérieur de la voiture en question et en vous référant au contexte, expliquez le sens des mots suivants en justifiant votre réponse. (Si vous n’avez absolument pas la moindre idée à quoi ressemble une Chevrolet de la fin des années cinquante, il vous reste toujours google images.)

 

Regardez les images ci-dessous puis répondez à la question suivante :

note: TLFi

Pour lire un texte, on a recours à diverses stratégies d’interprétation dont on est rarement conscient. Pour nous sensibiliser à ces processus de lecture, nous allons procéder à une lecture orientée du texte. L’activité nous pose deux questions après chaque étape :


Ben Jelloun, Tahar. La prière de l’absent. Paris: Seuil, 1981: 123-124.

 

Chapitre 10 : La nuit claire de l’apparence

 

C’était une belle Chevrolet noire datant de la fin des années cinquante. Une voiture large et solide. Le tableau de bord était là pour le décor. Les aiguilles indiquaient depuis longtemps, depuis toujours, le vide, le néant. Elles signalaient ainsi l’insolence du temps. Elles s’étaient arrêtées dans leur cadran, un peu au hasard. Le propriétaire du taxi les astiquait avec un chiffon jaune. Il aimait faire briller le métal.

 

Après maintes tractations, il installa ses voyageurs : Yamna, l’enfant, Sindibad et Boby sur la banquette arrière ; devant un gros et un mince.

 

Avant de tourner la clé de contact, il balbutia quelque chose comme « Au nom de Dieu le Miséricordieux »…C’était un homme vif et rusé. Il avait encore sa famille dans le Haouz et il faisait le taxi entre Casablanca et Marrakech. Il se mit à raconter une histoire :

 

-Un jour, c’était un vendredi de la pleine lune ; j’allais rentrer chez moi à Douar Doum, quand le petit Brahim m’arrêta et me dit : « Une affaire pour toi : trois pèlerins qui viennent d’arriver à Casablanca et ils sont impatients de rentrer chez eux, à Marrakech. Ils sont prêts à payer le prix. » C’était dix heures du soir.

 

Je fais mon petit calcul et je me dis, après tout, pourquoi pas ? Je n’ai pas sommeil et puis j’aime bien rouler à la lumière de la lune. J’arrive près de la gare, je vois trois vieux messieurs, habillés en blanc. Des hommes silencieux, fatigués sans doute par le voyage, en tout cas, ils ne discutèrent même pas le prix. Ils me donnèrent quatre billets de cinquante dirhmas. Pas un mot. Ils ne dormaient pas. Ils avaient les yeux ouverts et ne bougeaient presque pas. Le silence pesant m’angoissa. Ce n’est pas que j’aime le bruit, mais j’aime la parole.

 

Je mis en marche la radio. Une main l’arrêta. Je roulais et j’observais la lune. Elle était tellement pleine et belle qu’elle risquait de tomber. Des fois, j’ai des clients un peu maniaques. Ceux-là étaient sous la loi du silence. Vers une heure du matin, j’entrai à Marrakech. J’arrêtai la voiture à la gare routière de Jamaa el Fna et descendis leur ouvrir la portière et leur donner leurs bagages.

 

« Vous n’allez pas me croire, mais je vous jure sur la tête de mes enfants que ce que je vais vous dire est la stricte vérité : sur la banquette arrière il y avait trois sacs en toiles blanche remplis de paille. Dans le coffre, il y a avait une sacoche pleine d’ossements humains. J’allais devenir fou, j’ai hurlé. Personne ne m’entendit. Je mis la main dans ma poche pour vérifier s’ils ne m’avaient pas refilé de la fausse monnaie, et je trouve quatre pierres, des cailloux pas plus grands que des poires.

 

« Alors vous savez, depuis ce jour-là, je ne voyage plus de nuit et je parle avec mes voyageurs. Il faut me comprendre ! Que chacun raconte une histoire. La route sera moins longue !… (123-124)

 

 

Questions de compréhension et d’analyse

TERMES LITTERAIRES A RETENIR* :

  • Le récit enchâssé : c’est le récit dans le récit. Exemple : les aventures d’Ali Baba que raconte Schéhérazade au sultan dans Les mille et une nuits. Dans ce texte de Tahar Ben Jelloun, le récit enchâssé est l’histoire que le propriétaire du taxi raconte : le trajet en taxi avec les trois pèlerins et la découverte des ossements dans la voiture (de “Un jour, c’était un vendredi” jusqu’à “des cailloux pas plus grands que des poires”).
  • Le récit cadre : c’est le récit principal dans lequel est emboîté le récit enchâssé. Exemple : dans Les mille et une nuits, c’est l’histoire de Schéhérazade qui tente d’apaiser la colère du sultan et de sauver ainsi sa vie mais aussi celle des femmes de son royaume. Dans le texte de Tahar Ben Jelloun, c’est la description de la voiture et des personnages (de “C’était une belle chevrolet” jusqu’à “Il se mit à raconter une histoire”) et la dernière phrase de conclusion

* Retenez bien ces termes que vous devez savoir définir lors de la prochaine interrogation !

 

Questions de discussion

 

Cliquez ICI pour répondre aux trois questions de discussion* (n’oubliez pas ensuite de revenir au Critical Reader qui n’est pas terminé !)

 

* Si le lien ne fonctionne pas, connectez-vous à Learn@UW puis cliquez sur Communication–Discussion–Cours en ligne—Questions de discussion / Tahar Ben Jelloun où vous pourrez répondre aux questions.


Ben Jelloun, Tahar. « Un fait divers et d’amour. » Le premier amour est toujours le dernier: nouvelles. Paris: Editions du Seuil, 1995. 55-58.

 

Le texte de la nouvelle ainsi que des extraits de la préface se trouvent dans le recueil de textes polycopiés ou sur L@UW.

 

Questions de compréhension et d’analyse

 

Une recherche google : Une recherche google pour les mots « chauffeur + enceinte + stérile » effectuée le 6 janvier 2008 donne comme premier résultat l’histoire suivante, affichée en mai 2007 par « camelia30 », âgée de 20 ans.

 

« Un soir, alors que les rues étaient vides, une femme enceinte était sur le bord de la route à attendre, elle vit un taxi, l’appela et monta à l’intérieur. Le chauffeur lui demanda où elle allait, alors elle répondit :
– Je ne sais pas où aller, ramène-moi chez toi. le chauffeur refusa et lui demanda de descendre, alors elle le menaça de prévenir la police et de leur dire qu’elle était enceinte de lui.

 

Au final, l’homme qui était marié et père de 4 enfants l’emmena quand même. Une fois qu’ils étaient arrivés chez lui, la femme du chauffeur insulta son mari car la femme enceinte lui avait fait croire qu’elle était enceinte de lui. Le chauffeur, pour montrer qu’il n’était pas le père de l’enfant, prit la décision de faire un test de paternité à la naissance de l’enfant. Un mois après l’enfant naquit, le père fit plusieurs tests ADN,… cependant il découvrit qu’il était STERILE depuis son plus jeune âge…… et ouais donc fin de l’histoire : de qui étaient ces soi-disant quatre enfants??? »

 

Source

 

NB : Le texte original comprenait de nombreuses fautes d’orthographe, syntaxiques et grammaticales. Je l’ai donc corrigé pour une meilleure compréhension. Vous pourrez retrouver le texte non-corrigé en cliquant sur Source.


//Missing youtube video

 

Dans la vidéo ci-dessus, vous trouverez un court entretien auquel duquel Tahar Ben Jelloun explique son rapport à la langue française. Que pensez-vous de ses remarques ? Êtes-vous d’accord ?
Réfléchissez à ces questions, nous en discuterons ensemble en classe.

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