7 Hugo, “L’Expiation” – Stephanie Ragan

Victor Hugo, né le 26 février 1802 à Besançon et mort le 22 mai 1885 à Paris, était un poète, dramaturge, écrivain, romancier, et figure politique française dans le mouvement romantique.  Hors de France, Hugo est plus connu pour ses romans Les Misérables (1862) et Notre Dame de Paris (1831).  Mais en France, il est plus connu pour sa poésie, comme le texte dont je parle ici, Les Châtiments (1852), avec le poème « L’Expiation. »

 

image
Victor Hugo, c. 1870

 

 

« L’Expiation » est un poème de la forme alexandrin qui se situe au centre de la collection des poèmes, Les Châtiments.  Cette collection est écrite en 1852, et « l’Expiation » est un poème épique qui parle de la défaite et retraite de Napoléon I.  Après le coup d’état de Napoléon III du 2 décembre 1851, Hugo s’est exilé et pour dénoncer le régime de Louis-Napoléon, et il écrit Les Châtiments pendant son exile.  Ce poème se concentre sur Napoléon Bonaparte, mais Hugo l’a écrit pour montrer un contraste entre son neveu, Napoléon III.  « L’Expiation » est composé de sept tableaux mais je me concentrerai sur la première partie, dont Hugo décrit de la retraite de Napoléon I dans la Russie.  La partie II raconte sa défaite à Waterloo. La partie III parle de l’exil de Napoléon I à Sainte-Hélène. Les parties IV, V, et VI parlent de la mort de Napoléon et de sa mémoire. Et finalement, dans la partie VII, Napoléon se réveille sous le tombeau et pense à son crime et à son châtiment : le coup d’État du 18 Brumaire et l’instrumentalisation de sa gloire par son neveu, Napoléon III.  Partout dans le poème, il y a une répétition de la question qui le trouble : est-ce là le châtiment ? Non.

 

 

image
Honoré Daumier, Les Châtiments, 1872

“L’Expiation”

                                I.

 

Il neigeait. On était vaincu par sa conquête.
Pour la première fois l’aigle baissait la tête.
Sombres jours ! l’empereur revenait lentement,
Laissant derrière lui brûler Moscou fumant.
Il neigeait. L’âpre hiver fondait en avalanche.
Après la plaine blanche une autre plaine blanche.
On ne connaissait plus les chefs ni le drapeau.
Hier la grande armée, et maintenant troupeau.
On ne distinguait plus les ailes ni le centre.
Il neigeait. Les blessés s’abritaient dans le ventre
Des chevaux morts ; au seuil des bivouacs désolés
On voyait des clairons à leur poste gelés,

Restés debout, en selle et muets, blancs de givre,
Collant leur bouche en pierre aux trompettes de cuivre.
Boulets, mitraille, obus, mêlés aux flocons blancs,
Pleuvaient ; les grenadiers, surpris d’être tremblants,
Marchaient pensifs, la glace à leur moustache grise.
Il neigeait, il neigeait toujours ! La froide bise
Sifflait ; sur le verglas, dans des lieux inconnus,
On n’avait pas de pain et l’on allait pieds nus.
Ce n’étaient plus des cœurs vivants, des gens de guerre
C’était un rêve errant dans la brume, un mystère,
Une procession d’ombres sous le ciel noir.
La solitude vaste, épouvantable à voir,
Partout apparaissait, muette vengeresse.
Le ciel faisait sans bruit avec la neige épaisse
Pour cette immense armée un immense linceul ;
Et chacun se sentant mourir, on était seul.
— Sortira-t-on jamais de ce funeste empire ?
Deux ennemis ! le czar, le nord. Le nord est pire.
On jetait les canons pour brûler les affûts.
Qui se couchait, mourait. Groupe morne et confus,
Ils fuyaient ; le désert dévorait le cortège.
On pouvait, à des plis qui soulevaient la neige,
Voir que des régiments s’étaient endormis là.
Ô chutes d’Annibal ! lendemains d’Attila !
Fuyards, blessés, mourants, caissons, brancards, civières,
On s’écrasait aux ponts pour passer les rivières,
On s’endormait dix mille, on se réveillait cent.
Ney, que suivait naguère une armée, à présent
S’évadait, disputant sa montre à trois cosaques.
Toutes les nuits, qui vive ! alerte ! assauts ! attaques !

Ces fantômes prenaient leur fusil, et sur eux
Ils voyaient se ruer, effrayants, ténébreux,
Avec des cris pareils aux voix des vautours chauves,
D’horribles escadrons, tourbillons d’hommes fauves.
Toute une armée ainsi dans la nuit se perdait.
L’empereur était là, debout, qui regardait.
Il était comme un arbre en proie à la cognée.
Sur ce géant, grandeur jusqu’alors épargnée,
Le malheur, bûcheron sinistre, était monté ;
Et lui, chêne vivant, par la hache insulté,
Tressaillant sous le spectre aux lugubres revanches,
Il regardait tomber autour de lui ses branches.
Chefs, soldats, tous mouraient. Chacun avait son tour.
Tandis qu’environnant sa tente avec amour,
Voyant son ombre aller et venir sur la toile,
Ceux qui restaient, croyant toujours à son étoile,
Accusaient le destin de lèse-majesté,
Lui se sentit soudain dans l’âme épouvanté.
Stupéfait du désastre et ne sachant que croire,
L’empereur se tourna vers Dieu ; l’homme de gloire
Trembla ; Napoléon comprit qu’il expiait
Quelque chose peut-être, et, livide, inquiet,
Devant ses légions sur la neige semées :
« Est-ce le châtiment, dit-il, Dieu des armées ? »
Alors il s’entendit appeler par son nom
Et quelqu’un qui parlait dans l’ombre lui dit : Non.


« L’Expiation » comme une fable d’Hugo

 

Quand on pense aux fables comme celles de La Fontaine ou de Grimm, on ne fait pas la connexion à Victor Hugo. Mais son poème, « L’expiation, » peut être situer exactement là.  A travers les aspects d’une fable, la forme de la poésie, et sa créativité, Hugo transforme la structure fabuliste pour nous donner une forme poétique.  Dans cette analyse, je vais expliquer comment Hugo a écrit pas seulement un poème épique, mais un poème qui peut se situer à côté des contes des frères Grimm, dans le cadre des fables.

Avant de comparer ce poème d’Hugo avec une fable, il faut se poser la question, « Qu’est-ce que c’est une fable ? »[1]  Certainement on peut donner des exemples : Hansel et Gretel, Le Petit Chaperon rouge, La Poule aux œufs d’or, etc.  Mais quels sont les aspects d’une fable ?  D’abord, une fable n’est ni un conte de fées ni une parable. Un conte de fées ne doit avoir pas une morale ou une leçon, comme une fable.  Et une parable n’utilise pas de personnification, comme une fable.  Une fable est une courte œuvre de fiction qui a une morale ou leçon. Aussi elle utilise des animaux, des forces de la nature, ou des autres objets inanimés pour représenter les personnages par personnification ou animisme (“Fable” 2).  Wadsworth dit que : « fables communicate two things at once ; they relate a concrete incident or anecdote and from this they draw or at least suggest a general observation on life – perhaps a maxim, proverb, or moral lesson » ( 1126).  C’est une définition technique, mais quand on pense aux fables, on trouve qu’il y d’autres éléments qui se trouvent dans les fables – le cadre, par exemple.  Pensez aux contes de Grimm.  Quel est le cadre que vous imaginez immédiatement ?  Ça c’est la forêt, n’est-ce pas ?  C’est un cadre qui a un peu de mystère, mais en même temps c’est un peu familier.  Donc, les images jouent un rôle important pour protéger les fables dans les mémoires et pour évoquer un certain sens.

Parce que je me concentre dans la première partie de « L’Expiation, » il faut dire que la Partie I est le commencement de sa fable.  Il situe l’histoire dans l’espace et le temps, et présente les personnages de l’histoire.  Le personnage principal qui va apprendre la morale du poème, c’est Napoléon – mais on n’a pas la réponse d’Hugo sur la question de la leçon dans la Partie I.  La Partie I, c’est le début de cette histoire.  Hugo structure la plupart des verbes de la Partie I avec l’imparfait pour raconter des descriptions.  Comme une fable, Hugo d’abord établit le cadre, alors présente son personnage principal et sa description de lui, et enfin les actions commencent.  Ce n’est pas avant les dernières lignes de la Partie I que les verbes d’action commencent avec Napoléon.

Quoique le plus notable aspect d’une fable est la morale, le commencement du conte et le cadre peuvent évoquer un sens qui donne naissance à l’épiphanie de la morale.  Par exemple, pensez à « Il était une fois… »  Cette ligne très connue place le conte dans une certain espace et temps qui est loin du lecteur.  Mais pas trop loin, parce qu’une fable doit parler des causes qui concernent le peuple (même si c’est à travers les métaphores ou les symboles).  L’utilisation de l’imparfait place le lecteur dans un temps passé et donne au lecteur une description du cadre.  Dans la même manière, Hugo débute « L’Expiation » avec la ligne « Il neigeait ».  Hugo montre l’importance de cette ligne tout de suite par le changement du rythme présumé de l’alexandrin et le placer au début du poème et avant l’hémistiche de la forme alexandrin.  Immédiatement, cela attire notre attention.  Et après ça, Hugo souligne l’importance de « Il neigeait » par sa répétition plusieurs fois dans le poème.  Grant explique l’importance de cette ligne en disant :

 

« No part of that vision remains with greater vividness in the reader’s mind than the terrible curtain of snow, incessantly falling, stretching out in endless monotony, bringing inevitable tragedy upon Napoleon’s great odyssey.  Hugo introduces the snow immediately: ‘Il neigeait’; and by the simple repetition of that phrase he depicts in large measure the struggle of the Grande Armée with the elements » (Grant 25).

 

Hugo retourne à cette expression cinq fois dans les vers 1, 5, 10, et 18.  Chaque fois, Hugo casse le rythme de l’alexandrin avant l’hémistiche et le lecteur se souvient de l’infinitude de la neige.  Cette phrase évoque un sens chez le lecteur de la monotonie silencieuse de la marche des soldats.  Comme la défaite, la mort, et le désespoir, la neige couvre tout.  Avec le vers « Il neigeait. L’âpre hiver fondait en avalanche, » Hugo dit que, comme une avalanche, la mort est intraitable.  Le contraste entre « fondait, » qui évoque une lenteur, et « avalanche, » qui apporte un sens de rapidité violente, ne fait qu’augmenter le sentiment.  La dernière reprise est marquée par un redoublement : « Il neigeait, il neigeait toujours ! »  Le mot « toujours » souligne l’idée de répétition, tout comme les lignes qui raconter une liste : « boulet, mitraille, obus », « Fuyards, blessés, mourants, caissons, brancards, civières. »

Hugo écrit « l’empereur revenait lentement … Après la plaine blanche une autre plaine blanche. »  Ces lignes renforcent l’insistance de la blancheur, de la monotonie et de l’infini.  Et Hugo continue avec son insistance de la blancheur et la froideur avec les mots « givre, » « flocons blancs, » « froide bise, » « poste gelés, » « fondait, » « avalanche » et « l’âpre hiver. »  Hugo aussi mélange la blancheur avec les accents de noir et gris avec les mots « Moscou fumant, » « moustache gris, » « ciel noir, » et « l’ombre. »  L’effet de ce mélange est comme un tableau noir et blanc, et ça évoque un sens de vide et solitude.  Et aussi, ce mélange de la blancheur de la neige et la noirceur du ciel évoque la grisaille des cadavres des soldats morts.

Hugo utilise aussi la forme alexandrine pour évoquer un lien entre le rythme de l’alexandrin et la marche lente des soldats dans la neige.  Le rythme régulier de l’alexandrin imite le son des pas des soldats et évoque le sens de la longue marche monotone.  Il y a « un mouvement inexorable qui est évoqué par la prosodie, le rythme et le lexique … Il impose un tempo grave et solennel d’une grande ampleur qui est caractéristique de la dimension épique» (L’Expiation – Victor Hugo – Les Châtiments 3).

Pour ajouter au tableau du cadre, Hugo inclut l’aspect du silence par montrer les actions arrêtées.  Par exemple, vers 12-17 :

 

« On voyait des clairons à leur poste gelés,

Restés debout, en selle et muets, blancs de givre,

Collant leur bouche en pierre aux trompettes de cuivre.

Boulets, mitraille, obus, mêlés aux flocons blancs,

Pleuvaient ; les grenadiers, surpris d’être tremblants,

Marchaient pensifs, la glace à leur moustache grise. »

 

Ici, Hugo contraste les mots qui évoquent un sens d’action ou bruit (« clairons, » « bouche » / « moustache » « trompettes, » « boulets, » « mitraille, » « obus, » « grenadiers ») avec les mots silencieux ou immobile (« gelés, » « restés, » « muets, » « givre, » « pierre, » « pensifs ») pour souligner le silence et la lenteur.  Les clairons sont silencieux comme la neige.  Les trompettes qui annoncent la Grande Armée sont comme des statues.  Les armes pour conquérir les ennemis sont maintenant aussi tranquille que les flocons de neige.  Les grenadiers, qui font d’habitude trembler la terre avec leurs grenades, maintenant se trouvent à tremblant eux-mêmes.  Les bouches avec des moustaches, qui d’habitude hurlent des cris de guerre et victoire, sont maintenant gelées et elles ne disent rien.  Comme Hugo écrit « Le ciel faisait sans bruit avec la neige épaisse ; Pour cette immense armée un immense linceul … on était seul, » la silence, la mort, et la solitude couvrent tout.

Mais qu’est-ce que c’est la ressemblance à une fable – cette cadre d’Hugo ?  C’est le « Il était une fois » d’Hugo.  Évidemment, la description du cadre d’Hugo est plus longue que la plupart des fables.  Mais les descriptions visuelles sont une partie d’une fable qui est très importante pour situer le moral au cadre, pour connecter à l’audience (à travers un lieu un peu familier), et pour aider à évoquer un certain sentiment.  Encore fois, les fables des frères Grimm sont un bon exemple.  L’image de la Forêt-Noire fait autant partie de leurs contes que les morales.  Regardez les images de plusieurs fables de Grimm :

image
Belle au bois dormant
image
Le Petit Chaperon rouge
image
Blanche Neige et les sept nains
image
Hansel et Gretel

 

Quand on regarde les images des fables de Grimm, on ne peut pas nier l’importance du cadre dans ces contes.  La forêt n’est pas seulement dans toutes les images, mais elle est une grande partie du sentiment des images – le forêt est un vrai personnage dans ces fables.  Dans l’image de Le petit chaperon rouge, on voit la forêt qui donne naissance au loup, le méchant personnage, qui surgit de la forêt.  Et si on compare ces images avec les images de la scène dont Hugo parle, on voit des similarités :

 

image
La retraite de Napoléon de Moscou, c. 1863
image
La retraite de la Russie

 

Comme la neige, la forêt de Grimm évoque un sens de solitude et d’une chose qui couvre tout.  Aussi elle place le lecteur dans un autre monde, mais un monde qui est, en même temps, familier.

Un autre élément d’une fable est la personnification.  Dans les fables, il y a toujours un élément de personnification – le loup dans Le petit chaperon rouge, par exemple.  Mais la personnification n’est que réserver pour les animaux.  La personnification peut être aussi être vue chez les objets inanimés ou les forces de la nature.  Dans « L’Expiation, » on peut voir comment la neige est un élément qui ressemble personnification : « Il neigeait, il neigeait toujours ! La froide bise ; Sifflait. »  L’idée de la froideur capable d’une bise laisse entendre qu’elle a un corps.  Mais la personnification de la neige est aussi impliquée par son importance dans le poème.  Hugo décrit et utilise la neige comme une personnage de son histoire.  Mais il y a aussi plusieurs autres lignes où Hugo utilise personnification : « La solitude vaste, épouvantable à voir, ; Partout apparaissait muette vengeresse. »  La personnification de la solitude vengeresse est évidente comme un être qui est capable d’être silencieux.  Aussi Hugo donne la vie au désert : « Ils fuyaient ; le désert dévorait de cortège. »  Encore fois, ça c’est la neige – la plaine blanche qui dévore les soldats.   Mais Hugo aussi change les règles d’une fable et utilise une sorte de personnification à l’envers.  Au début, Hugo nous présente Napoléon pas par son nom, mais par dire un symbole animal : « Pour la première fois, l’aigle baissait la tête. »   Hugo commence avec la personnification d’une aigle, mais après ça, il ajoute :

 

« Il était comme un arbre en proie à la cognée.

Sur ce géant, grandeur jusqu’alors épargnée,

Le malheur, bucheron sinistre, était monte ;

Et lui, chêne vivant, par la hache insulté,

Tressaillant sous le spectre aux lugubres revanches,

Il regardait tomber autour de lui ses branches. »

 

Hugo change un peu les règles d’une fable et, au lieu de donner les caractéristiques humaines aux animaux, il donne des caractéristiques d’animaux et des objets inanimés à son personnage principal, Napoléon.  Pourtant, ce changement est logique parce qu’Hugo a déjà parlé de la perte d’humanité.  Hugo a écrit : « On ne connaissait plus les chefs ni le drapeau. ; Hier la grande armée, et maintenant troupeau. ; On ne distinguait plus les ailes ni le centre. »  En disant qu’ils ne connaissent pas le drapeau, Hugo veut dire qu’ils ont perdu leur conscience de soi.  Maintenant, ils ne sont qu’un troupeau sans une identité, mais aussi ils n’ont pas une forme concrète, sans « les ailes ni le centre. »  Donc, ils ont perdu leurs consciences de soi, leurs identités, et leurs formes et il faut qu’Hugo utilise les caractéristiques des animaux et des forces de nature pour apporter la vie aux humains.

Un aspect d’une fable qu’on doit en parle dans une comparaison entre « L’Expiation » et une fable est le fait que la définition d’une fable dit qu’elle est une courte œuvre de fiction (“Fable” 2).  Parce que le poème d’Hugo est basé sur un évènement d’histoire, peut-on le considérer une fable ?  Pour répondre à cette question, on peut noter que

 

« What compelled the Grimms to concentrate on old German epics, tales, and literature was a belief that the most natural and pure forms of culture – those which held the community together – were linguistic and based in history. According to them, modern literature, even though it might be remarkably rich, was artificial and thus could not express the genuine essence of the Volk culture that emanated naturally from experience and bound the people together » (“How the Grimm Brothers Saved the Fairy Tale” 6).

 

Donc, oui, une fable peut être basée sur les évènements d’histoire qui concernent le peuple d’une culture.  Et Hugo ne nous donne pas une leçon d’histoire avec seulement les faits.  Il ajoute des éléments du fantastique dans son poème, comme les vers « C’était un rêve errant dans la brume, un mystère, ; Une procession d’ombres sous le ciel noir ; … Ces fantômes… »  Les mots « rêve, » « brume, » « mystère, » « ombres, » « fantômes » évoquent un sens fantastique.  Aussi, Napoléon parle à Dieu et « Alors il s’entendit appeler par son nom ; Et quelqu’un qui parlait dans l’ombre lui dit : Non. »  La voix de Dieu n’est pas un fait historique – ça c’est un élément de l’intrigue fictionnelle d’Hugo.  En plus, la personnification et l’imagerie dans « L’Expiation »  contribue à l’aspect de la fiction.  Pour ce poème d’Hugo et pour une fable, cet élément qui place le conte un peu loin du monde de lecteur est important : « Moving from the factual toward the metaphorical allows the reader a certain physical and temporal distance from the event of December, 1851, while deepening their affective involvement in Hugo’s project of redemption.  Concepts such as freedom and justice are given life through mythical imagery » (VanderWolk 109).

Finalement, on parle de l’élément qui peut être le plus important dans une fable – la morale.  On voit un exemple d’une morale dans la fable The Lorax, par Dr. Seuss : « ‘But now,’ says the Once-ler, ‘now that you’re here, the words of the Lorax seems perfectly clear.  UNLESS someone like you cares a whole awful lot, nothing is going to get better.  It’s not.’ » (Dr. Seuss 64).  C’est un commentaire sur la déforestation et l’environment et une morale de la culpabilité des humains si on n’agit pas pour le changement.  Hugo écrit « L’expiation » pour montre un contraste entre Napoléon I et Napoléon III.  Dans l’avis d’Hugo, Napoléon III utilise le nom fameux de son oncle pour gagner une puissance totale, mais en fait il ne mérite pas ce titre et il a violé la loi de la république.  Dans le poème, Napoléon I doit apprendre ce qui est son châtiment.  Napoléon III est ce châtiment.  Hugo nous donne un commentaire sur le règne de Napoléon III, remarque des ramifications des coups d’état du 18 Brumaire dans le passé et du 2 décembre 1851 dans le présent, et nous présente une leçon d’histoire qui se répète.  En plaçant le cadre dans le passé pour commenter sur les évènements du présent, « we thus have a view of events that is more global and more able to give the author and his readers a better understanding of the implications of what has taken place » (VanderWolk 113).  Et pour connecter ces implications au peuple et le lecteur aux évènements du passé, Hugo utilise le mot « on » au lieu de « ils » : « On ne connaissait plus les chefs ni le drapeau, » « On voyait des clairons à leur poste gelés, » « On n’avait pas de pain, » « On s’endormait dix mille, on se réveillait cent. »  Pour introduire la question de la morale, Hugo écrit que Napoléon I pose la question de son châtiment dans la première partie du poème et par un dialogue : « ‘Est-ce le châtiment, dit-il, Dieu des armées ?’ ; Alors il s’entendit appeler par son nom ; Et quelqu’un qui parlait dans l’ombre lui dit : Non. »  Et la variance sur la manière de donner la morale n’est pas trop bizarre dans une fable.  La Fontaine, un autre auteur des fables, joue avec cette manière aussi.  Quelquefois, il place la morale dans la forme des réflexions sur le récit, a travers les personnages ou l’auteur lui-même (Slater 1129).  Donc, les changements de la manière traditionnelle de donner une morale ne changent pas la classification de la fable.

Dans le genre des fables, on ne doit pas rester avec les mêmes formules traditionnelles.  En fait, les auteurs qui peuvent créer dans quelques limites d’un genre, mais en même temps développer des nuances nouvelles, ce sont les écrivains qui font avancer l’écriture.   D’abord, La Fontaine a changé la forme traditionnelle pour raconter les fables.  Il a voulu changer la forme d’une fable pour lui donner « un certain charme » et pour développer les autres potentiels des fables.  (Wadsworth 1129).  Et après lui, Hugo a continué l’exploration de la forme d’une fable : « Hugo’s project in Les Chatiments is not simply a practical, political one ; he intends to surpass the everyday and bring his ideal to the fore through the blending of realism and mythology, with himself as the pied piper leading the parade » (VanderWolk 117)Avec ses expérimentes poétiques sur les éléments de la personnification, du cadre, et de la forme, Hugo a créé sa propre fable pour son temps.


Bibliographie

 

Daumier, Honoré. “Les Chatiments.” Napoleon.Org, 1872, https://www.napoleon.org/en/history-of-the-two-empires/images/les-chatiments-2/.

Dr. Seuss. The Lorax. Penguin Random House, 1971.

“Fable Examples and Definition.” Literary Devices, 1 Dec. 2015, http://www.literarydevices.com/fable/.

“Fable, Parable, and Allegory – Parable.” Encyclopedia Britannica, https://www.britannica.com/art/fable-parable-and-allegory. Accessed 21 Nov. 2019.

Feeney, D. C. “Epic Hero and Epic Fable.” Comparative Literature, vol. 38, no. 2, 1986, pp. 137–58. JSTOR, JSTOR, doi:10.2307/1771065.

“French Invasion of Russia.” Wikipedia, 21 Nov. 2019. Wikipedia, https://en.wikipedia.org/w/index.php?title=French_invasion_of_Russia&oldid=927221028.

Grant, Elliott M. “L’Événement and L’Expiation.” Modern Language Notes, vol. 47, no. 1, 1932, pp. 24–26. JSTOR, JSTOR, doi:10.2307/2913372.

“How the Grimm Brothers Saved the Fairy Tale.” National Endowment for the Humanities (NEH), https://www.neh.gov/humanities/2015/marchapril/feature/how-the-grimm-brothers-saved-the-fairy-tale. Accessed 21 Nov. 2019.

L’expiation – Victor Hugo – Les Châtiments. https://bacdefrancais.net/l-expiation-hugo.php. Accessed 21 Nov. 2019.

Limited, Alamy. “Stock Photo – Gustave Doré; The Sleeping Beauty; The Prince Approaches the Castle Where the Population Sleeps from Perrault’s Fairy Tales.” Alamy, https://www.alamy.com/stock-photo-gustave-dor-the-sleeping-beauty-the-prince-approaches-the-castle-where-33098713.html. Accessed 21 Nov. 2019.

“Nadar (Gaspard-Félix Tournachon). Victor Hugo. c. 1870 | MoMA.” The Museum of Modern Art, 1870, https://www.moma.org/collection/works/58206.

“NEONSCOPE – 15 Illustrations for Little Red Riding Hood.” Neonscope, http://blog.neonscope.com/Arts/Illustration/1157-15-illustrations-for-little-red-riding-hood. Accessed 21 Nov. 2019.

Nielsen, Kay They Saw That the Cott ||| Art ||| Sotheby’s L12409lot6fwd9en. http://www.sothebys.com/en/auctions/ecatalogue/2012/the-art-of-illustration-l12409/lot.50.html. Accessed 24 Nov. 2019.

Northen, Adolph. English: Napoleon’s Retreat from Moscow. [1], Wikimedia Commons, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Napoleons_retreat_from_moscow.jpg. Accessed 21 Nov. 2019.

Retreat-the-Retreat-from-Russia.Jpg (1500×1068). https://epikfails.com/wp-content/uploads/2014/03/retreat-the-retreat-from-russia.jpg. Accessed 21 Nov. 2019.

Slater, Maya. The Craft of LaFontaine. A&C Black, 2001.

Stephens, Bradley. “Victor Hugo.” French Studies, vol. 63, no. 1, Jan. 2009, pp. 66–74. academic-oup-com.ezproxy.library.wisc.edu, doi:10.1093/fs/knn176.

“The Glass Coffin by Ashley Stewart.” Curiator, https://curiator.com/art/ashley-stewart/the-glass-coffin. Accessed 21 Nov. 2019.

VanderWolk, William. Victor Hugo in Exile: From Historical Representations to Utopian Vistas. Bucknell University Press, 2006.

Wadsworth, Philip A. “The Art of Allegory in La Fontaine’s Fables.” The French Review, vol. 45, no. 6, 1972, pp. 1125–35. JSTOR.

 


  1. Le mot fable vient du mot Latin, fābula, qui veut dire « une histoire ou un conte. »

License

French 951 Seminar on 19th Century Poetry Copyright © by Class of French 951, Fall 2019. All Rights Reserved.

Share This Book