Poetry???

Assignment: Comment suivre le rythme et les rimes des poèmes français ?

Ces exercices demandent aux étudiants de lire à voix haute quelques strophes de poésie, tout en se concentrant sur la prononciation de chaque syllabe dans chaque vers. Bien prononcer les syllabes est la première étape dans la compréhension d’un poème et doit précéder l’analyse du sens littéral des mots prononcés. Ce sera l’objectif de la première partie (A) de ce travail.
Une fois que l’étudiant aura appris à bien prononcer (et bien compter) les syllabes des vers de plusieurs poèmes, il passera au deuxième stade de l’appréciation d’un poème : l’identification des pauses (normales et non-grammaticales) dans les vers. Ce sera l’objectif de la deuxième partie (B) de ce travail.

 

Ce Critical Reader vous permet d’écouter des enregistrements des vers que vous répétez, et de vérifier l’identification des pauses dans les œuvres d’une grande variété de poètes. N’hésitez pas à revisiter ces exercices pendant le semestre, pour continuer à améliorer votre lecture de la poésie francophone.


Partie A : prononcer et compter les syllabes d’un vers

 

La plupart des poèmes français écrits entre 1800 et 1930 emploient des vers de 12, 10 et de 8 syllabes. Il existe aussi des poèmes écrits en vers de 5, 7 et 9 syllabes (surtout à partir de 1874). Quand on compte les syllabes d’un vers, on prononce les « e » muets à la fin de chaque mot, à l’exception des « e » muets qui se trouvent à la fin d’un vers. Si un mot se termine par un « e » muet et le mot suivant commence par une voyelle, il y a une élision de l’« e » muet à la seconde voyelle (pour former une seule syllabe).

Écoutez les vers suivants extraits du poème
« Les Hiboux » de Charles Baudelaire.

 

Sous les ifs noirs qui les abritent :
Sous | les- | ifs | noirs | qui | les | a | britent

 


Les hiboux se tiennent rangés
Les- | hi | boux | se | tienn | ent | ran | gés

 

L’homme ivre d’une ombre qui passe :
L’ho | mm-i | vre | d’u | n-om | bre | qui | passe

 

Porte toujours le châtiment :
Por | te | tou | jours | le | châ | ti | ment

 

Ces vers que vous avez prononcés sont des octosyllabes.


Un vers de douze syllabes est un alexandrin. Écoutez les exemples suivants en comptant les syllabes sur vos doigts. Ensuite répétez-les.

 

a) Air natal imprégné des souffles de nos champs
Qui fais les cœurs pareils et pareils les penchants.

                           ~Marceline Desbordes-Valmore

 

b) Ariane, ma soeur, de quel amour blessée
Vous mourûtes au bord où vous fûtes laissée.

~Racine

 

c) Il est amer et doux, pendant les nuits d’hiver,
D’écouter près du feu qui palpite et qui fume,
Les souvenirs lointains lentement s’élever
Au bruit des carillons qui chantent dans la brume.

~Baudelaire

 

Marceline Desbordes-Valmore

Racine

Baudelaire


Prononcez maintenant l’extrait suivant :

 

Pour que sourie encore une fois Jean-Baptiste
Sire je danserais mieux que les séraphins
Ma mère dites-moi pourquoi vous êtes triste
En robe de comtesse à côté du Dauphin
~ Apollinaire

 

Comptez maintenant le nombre de syllabes dans chaque vers de l’extrait que vous venez de prononcer et répondezà la question. Ensuite, écoutez le poème avant de continuer les exercices.

Écoutez le texte :


Prononcez ensuite l’extrait suivant :

 

Le vent de l’autre nuit a jeté bas l’Amour
Qui, dans le coin le plus mystérieux du parc,
Souriait en bandant malignement son arc,
Et dont l’aspect nous fit tant songer tout un jour !
~ Verlaine

Écoutez le texte :


Un vers de dix syllabes est un décasyllabe. Écoutez les exemples suivants en comptant les syllabes sur vos doigts. Ensuite répétez-les.

 

a) Et, quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser, je me trouve hors de peine.
~ Louise Labé

 

b) Tels ils marchaient dans les avoines folles
Et le vent seul entendit leurs paroles.
~ Verlaine

 

Louise Labé

Verlaine


Prononcez l’extrait suivant :

 

Je ne sais plus d’où naissait ma colère ;
Il a parlé… ses torts sont disparus ;
Ses yeux priaient, sa bouche voulait plaire :
Où fuyais-tu, ma timide colère ?
~ Marceline Desbordes-Valmore

 

Comptez le nombre de syllabes dans chaque vers de l’extrait que vous venez de prononcer.

Ensuite écoutez l’extrait :


Partie B : repérer les pauses

 

L’alexandrin
L’alexandrin (vers de douze syllabes) se divise d’habitude en deux moitiés de 6 syllabes chacune. Une pause se trouve par conséquent après la sixième syllabe. Répétez les exemples suivants en remarquant la pause :

 

a) Toutes les passions s’effacent avec l’âge
~ Hugo

 

b) Il ouvre un large bec, laisse tomber sa proie
~ La Fontaine

 

c) Des dames regardaient du haut de la montagne
~ Apollinaire

 

Maintenant, écoutez le poème avant de continuer les exercices, et répétez les vers en écoutant afin de bien remarquer la pause.

Hugo

La Fontaine

Apollinaire


Parfois, des pauses se trouvent aussi après les troisième et neuvième syllabes. Répétez les exemples suivants :

 

a) Et ton nom, tout à coup, s’échappe de mon cœur
~ Desbordes-Valmore

 

b) Tout servait, tout parait sa fragile beauté
~ Baudelaire

 

c) Puisque le ciel t’exerce, et te presse, ô grand arc
~ Valéry

 

Les pauses après les troisième, sixième et neuvième syllabes d’un alexandrin sont normales (ou grammaticales).

 

Maintenant, écoutez les vers et pratiquez :

 

Desbordes-Valmore

Baudelaire

Valéry


Toutes les autres pauses dans un alexandrin sont non-grammaticales et elles attirent notre attention sur les mots qui précèdent chacune de ces pauses.

 

Lisez l’exemple suivant:

 

Tu marches sur des morts, Beauté, dont tu te moques
~ Baudelaire

 

Maintenant, cliquez ici et lisez les vers suivants en marquant toutes les pauses qui s’y trouvent (les pauses grammaticales et non-grammaticales).

 

Écoutez les vers pour vérifier vos réponses :
Verlaine

Apollinaire

Baudelaire


LES VERS DE 10 SYLLABES

Les vers de 10 syllabes se divisent généralement en deux parties : ou bien en un groupe de 4 syllabes suivi d’un groupe de 6 syllabes, ou bien en un groupe de 6 syllabes suivi de 4 syllabes.

 

Répétez les exemples suivants en remarquant la pause :

 

Le piano que baise une main frêle
~ Verlaine

 

Plusieurs entrent, marraines mécontentes
~ Rimbaud

 

Je rêve que je rêve entre tes bras
~ Claude Roy

 

Je ne sais plus le fuir en son absence
~ Desbordes-Valmore

 

Verlaine

Rimbaud

Claude Roy

Desbordes-Valmore


Les pauses après les 4ème ou 6ème syllabes d’un vers de 10 syllabes sont donc normales (ou « grammaticales »). Toutes les autres pauses dans un vers de 10 syllabes sont non-grammaticales et elles attirent notre attention sur le mot qui précède chacune de ces pauses.

 

Répétez les exemples suivants en remarquant la pause non-grammaticale dans chacun :

 

Qui lentement dorlote mon pauvre être
~ Verlaine

Où vibrent les gencives des lutrins
~ Rimbaud

 

Il proteste En vain l’autre n’entend pas
~ Claude Roy

 

En vain, par force ou par douceur suprême
~ Desbordes-Valmore

 

Verlaine

Rimbaud

Claude Roy

Desbordes-Valmore


Lisez l’extrait suivant en marquant toutes les pauses qui s’y trouvent (les pauses grammaticales et non-grammaticales) :

 

Le marié a le vent qui le floue
Pendant son absence, ici, tout le temps.
Même des esprits des eaux, malfaisants,
Entrent vaguer aux sphères de l’alcôve.
~ Rimbaud


LES VERS DE 8 SYLLABES

 

Puisqu’on peut prononcer huit syllabes sans respirer, il y a parfois des vers de huit syllabes qui n’ont aucune pause.

 

Lisez, par exemple, ces deux vers de Verlaine :

 

Je ne me suis pas consolé
Bien que mon cœur s’en soit allé.

 

Néanmoins la plupart des vers de huit syllabes ont une pause après les 3ème, 4ème ou 5ème syllabes. Répétez les exemples suivants en remarquant la pause dans chacun :

 

J’irai seule en quittant tes yeux
~ Desbordes-Valmore

 

Le train glisse sans un murmure
~ Verlaine

 

Douceur d’être et de n’être pas
~ Valéry

 

Douce chose est que mariage
~ Christine de Pisan

 

l’horloge au pas triste et têtu
~ Claude Roy

 

Toute pause dans un vers de huit syllabes qui ne tombe pas après les 3ème, 4ème ou 5ème syllabes est non-grammaticale. Elle attire notre attention sur le mot qui précède la pause.

 

Ecoutez les enregistrements pour vérifier votre récitation :

 

Verlaine (1)

Desbordes-Valmore

Verlaine (2)

Valéry

Christine de Pisan

Claude Roy


Répétez les exemples suivants en remarquant les pauses non-grammaticales dans chacun des vers :

 

Des nappes d’eau s’épanchaient, bleues,
Entre des quais roses et verts
~ Baudelaire

Amour vos baisers florentins
Avaient une saveur amère
~ Apollinaire

— Ce salut soit le messager
Du temps, cap que ta poupe double
~ Mallarmé


PASSER DES PAUSES NON-GRAMMATICALES AUX MOTS CLES D’UN POEME

 

Une fois que vous aurez identifié les mots dans un poème qui sont accentués par les pauses non-grammaticales vous serez capable, en examinant ces mots accentués (les « mots clés ») d’établir une interprétation du poème qui est fondée sur ces mots clés. La troisième leçon de ce Critical Reader expliquera en détail comment l’identification des mots clés vous guidera vers les sens figurés d’un poème.

 

Considérez pour le moment le poème suivant :
*Vous pouvez passer le curseur sur les mots surlignés en gras pour en connaître le sens

 

Le Monde en nous

1 Chaque objet séparé de son bruit, de son poids 
2 Toujours dans sa couleur, sa raison et sa race,
3 Et juste ce qu'il faut de lumière, d’espace
4 Pour que tout soit agile et content de son sort
5 Et cela vit, respire et chante avec moi-même 
— Les objets inhumains comme les familiers —
Et nourri de mon sang s'abrite à sa chaleur. 
La montagne voisine un jour avec la lampe, 
Laquelle luit, laquelle en moi est la plus grande ? 
10 Ah ! je ne sais plus rien si je rouvre les yeux, 
11 Ma science gît en moi derrière mes paupières 
12 Et je n’en sais pas plus que mon sang ténébreux. 

 

~ Jules Supervielle

 

Ecoutez l’enregistrement du poème et répondez ensuite aux questions dans l’exercice qui vous guideront vers ses mots clés :


          Le Monde en nous

 

1 Chaque objet séparé de son bruit, de son poids 
2 Toujours dans sa couleur, sa raison et sa race,
3 Et juste ce qu'il faut de lumière, d’espace
4 Pour que tout soit agile et content de son sort
5 Et cela vit, respire et chante avec moi-même 
— Les objets inhumains comme les familiers —
Et nourri de mon sang s'abrite à sa chaleur. 
La montagne voisine un jour avec la lampe, 
Laquelle luit, laquelle en moi est la plus grande ? 
10 Ah ! je ne sais plus rien si je rouvre les yeux, 
11 Ma science gît en moi derrière mes paupières 
12 Et je n’en sais pas plus que mon sang ténébreux. 

~ Jules Supervielle


Vous venez d’apprendre à identifier les pauses non-grammaticales dans les vers de 12, 10 ou 8 syllabes. Dans la deuxième leçon, vous allez apprendre à isoler les rimes non-grammaticales. Toutes les non-grammaticalités formelles d’un poème (c’est-à-dire ses rimes non-grammaticales et pauses non-grammaticales) nous guideront vers ses sens figurés.

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