Rousseau, Les rêveries du promeneur solitaire (Promenade 5)
Rousseau, Les rêveries du promeneur solitaire (Promenade 5)
C’est dans cette Île que je me réfugiai après la lapidation de Môtiers. J’en trouvai le séjour si charmant, j’y menais une vie si convenable à mon humeur que résolu d’y finir mes jours, je n’avais d’autre inquiétude sinon qu’on ne me laissât pas exécuter ce projet qui ne s’accordait pas avec celui de m’entraîner en Angleterre, dont je sentais déjà les premiers effets. Dans les pressentiments qui m’inquiétaient j’aurais voulu qu’on m’eût fait de cet asile une prison perpétuelle, qu’on m’y eût confiné pour toute ma vie, & qu’en m’ôtant toute puissance & tout espoir d’en sortir on m’eût interdit toute espèce de communication avec la terre ferme de sorte qu’ignorant tout ce qui se faisait dans le monde j’en eusse oublié l’existence & qu’on y eût oublié la mienne aussi.
On ne m’a laissé passer guère que deux mois dans cette île, mais j’y aurais passé deux ans, deux siècles & toute l’éternité sans m’y ennuyer un moment, quoique je n’y eusse, avec ma compagne, d’autre société que celle du receveur, de sa femme & de ses domestiques, qui tous étaient à la vérité de très bonnes gens & rien de plus, mais c’était précisément ce qu’il me fallait. Je compte ces deux mois pour le temps le plus heureux de ma vie & tellement heureux qu’il m’eût suffi durant toute mon existence sans laisser naître un seul instant dans mon âme le desir d’un autre état.
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La lapidation de Môtiers
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était la campagne de Rousseau jusqu’à la fin de
sa vie et avec laquelle il a eu cinq enfants qu’il
a abandonnés à l’hospice pour enfants trouvés.Continuez la lecture et cliquez sur le fragment
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